BLOG D'ANAÏS par Gérard CABANE

BLOG D'ANAÏS par Gérard CABANE

156 - MAI 1968 - MAI 2018

Je me prépare à lire tout et n'importe quoi sur cette période que j'ai connue, aimée et à laquelle j'ai participé, pleinement participé.

Et l'on m'a même flingué pour ça.

Chacun à sa manière va "fêter" ce cinquantenaire de ce que l'on a appelé les "évènements", moment unique puisque mondial et dont la France qui n'en fut pas à l'origine, je pense à Prague qui dès janvier 68 a tenté de se libérer du joug soviétique, la France donc en fut le fer de lance.

Aujourd'hui les acteurs et actrices de ce mois de mai ont tous entre 65 et 75 ans et tous, du moins ceux qui ont vécu de l'intérieur cette "épopée" explosive, se souviennent du vent de liberté qui a parcouru nos rangs.

Pendant cette période et malgré (ou à cause) de mes longues nuits d'insomnie, j'ai tenu un journal, précis et sans orientation particulière car pour la majorité d'entre nous nous n'étions pas politisés.

Alors je ne vais pas aujourd'hui vous raconter ma "révolte", j'écrirai plus tard un roman qui aura ces journées pour toile de fond, non aujourd'hui je vais vous décrire l'avant 68, ce qui en quelque sorte fut le creuset de ce bordel qui jeta les mômes que nous étions dans ce que j'appelerai le tournant de cette fin de siècle.

 

Revenez en arrière et imaginez...

 

Une petite ville pas si éloignée que cela de Paris, des notables, des ouvriers, des commerçants et chaque communauté qui s'agite dans son monde, sans jamais ou si peu se mélanger, des rites, des habitudes, des regards, et, le dimanche, la messe dans la cathédrale pour la plupart et la sempiternelle queue chez le pâtissier pour ressortir avec son Saint-Honoré dans la boite. Une ville assoupie, léthargique qui vit au rythme des inquiétudes du monde alentour.

Je veux parler des deux blocs, je veux parler du nucléaire, du Vietnam après la Corée, après l'Algérie je veux parler de cette formidable impression d'être à côté, de vivre à côté de la vie qui bat quand tout autour ce n'est que confusion.

Et puis cet endormissement du doux pays, du bon pays, cet ennui que l'on trimballe parce que tout est statique, parce que tout est tracé, le fils dans la suite du père et la fille dans la couture et la broderie de la mère.

J'exagère ? Si peu, si peu...

Pourtant je l'aimais cette France ronronnante, oui je l'aimais mais comme une vieille grand-mère qui sourit et ne comprends plus.

Et puis il y avait les filles, enfin les filles et les garçons, les Beatles, les premiers happenings, les cheveux longs, les horribles pantys, sorte de culottes infranchissables, les blouses fermées, les baisers volés, dissimulés, les soupirs retenus et les rêves de partir.

Insensiblement, dans la mixité nouvelle, deux mondes n'en faisaient plus qu'un et chacun, ne supportant plus les interdits ancestraux, ruait de plus en plus quand "l'autorité" tentait de séparer ce qui inéluctablement allait s'unir.

Alors, irrémédiablement, se sont construits deux blocs qui ne se comprenaient plus.

Et les gosses se sont entêtés et les "adultes" se sont entêtés.

La suite vous la connaissez ou pensez la connaître.

 

Evidemment nous fûmes "récupérés", évidemment nous fûmes manipulés par une horde de politiciens en veille, évidemment...

Mais nous avions fait ce que nos parents n'avaient osé faire, ou du moins, nous avons osé ce qu'ils n'ont pu faire.

Que vous le vouliez ou pas, que vous soyez d'accord ou pas, de ce moment-là, les rapports entre un homme et une femme, une gamine et un gamin si vous préférez, ne furent plus les mêmes.

La pilule allait se généraliser.

Woodstock exploserait dans nos têtes.

Et Simone Weil peu d'années plus tard allait continuer à rendre nos compagnes plus libres.

En 68, parce que des gamines ont osé, la femme alors a commencé à remonter la pente des hommes.

 

 



16/03/2018
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