195 - L'ÊTRE ET LE PARAÎTRE
Quand j'étais môme il y avait les gendarmes et les voleurs, il y avait les garçons et les filles, il y avait le sucré et le salé, les cancres et les bons élèves enfin quoi les choses étaient claires, nettes, on ne se posait pas de questions, on était soit l'un, soit l'autre et tout s'articulait suivant des principes simples et de bons sens.
Aujourd'hui tout est inversé, tout est mélangé et plus rien n'est sûr, les uns étant les autres et les autres un peu des deux.
C'est vrai en politique, en amour et dans la vie courante.
La société dans laquelle nous vivons est devenue le carrefour de tous les possibles.
Et, quand tout est possible, tout devient brouillon, survolé, absorbé, ce qui est choquant est normal et ce qui était normal devient curieux.
L'homme moderne est bi ou gay, travaille 35 heures, ne bouffe plus de gluten, prend cinq semaines de vacances, ne fume pas, boit des cocktails énergétiques, a le pantalon sous les fesses et se balade l'oreillette coincée et le smartphone à la main.
Bon j'exagère… un peu.
A vrai dire je n'ai rien contre tout ça, mais je sens - oh comme je le sens bien ! - que je deviens une exception car, en reprenant chaque terme de ce qui précède, je suis strictement l'inverse.
Aujourd'hui en nivelant les valeurs, en prônant une égalité de façade, on donne une importance quasi primordiale à ce qui reste encore une minorité. Ceci étant, et ne vous y trompez pas, à force d'en faire des normes nos gosses suivront ces normes.
Pour autant cela va plus loin car cette société-là prône le "paraître" plus que ce qui est fondamental à mes yeux, l'esprit et le secret des coeurs, à tel point que le fisc - et j'en rigole - va bientôt aller traquer sur les réseaux sociaux les mauvais payeurs qui auront eu la bêtise, ou la flagornerie, d'exposer leur train de vie tout en montrant leur arrière-train.
On ment, on se vante, on dissimule le vrai pour jouer la comédie, on se fait passer pour ce que l'on n'est pas ( ou ce que l'on voudrait être), enfin quoi, plus rien n'est vrai, plus rien n'est faux et tout est dans un marigot où chacun balance sa ligne pour ferrer un poisson d'argent.
Alors les couillons de ma génération mais aussi les autres, ceux qui ont été éduqués aux valeurs précitées, se trouvent un peu paumés dans ce monde à l'envers, les voleurs devenant gendarmes, les filles des garçons et les cancres des idoles.
Enfin pas tout à fait puisque si j'ai été cancre je n'en suis pas pour autant idole !
Aussi je traque sans cesse le vrai, nouvelle chasse au trésor qui suppose une bonne dose d'optimisme, un soupçon de romantisme, un zeste d'inconscience et, comme aurait pu le dire César (le mien, pas celui de Rome) en ajoutant un quatrième tiers, un gros nuage de ténacité.
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