BLOG D'ANAÏS par Gérard CABANE

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67 - UNE RUE PRES DU CIMETIERE

C'est exactement ce que l'on appelle une femme "moderne".

 

Elle vient de basculer dans la quarantaine qu'elle a explosive, vivant dans une maison claire avec enfants, mari, le tout aimant et aimé.

Elle active sa vie comme d'autres viennent respirer l'air du temps, c'est à dire qu'elle ne concevrait pas l'enfermement et le repli sur soi, jouant de ses dons en faisant jouer les autres.

Théâtre, lectures, musique, elle se partage sur des tréteaux de fortune allant même jusqu'à offrir sa passion à ceux qui ont perdu le Nord et qui cherchent une sortie derrière les murs noirs d'une prison à vie.

Et à sortir n'est-ce pas, autant que ce soit avec l'image de cette belle femme quand, dans la solitude d'une cellule, il n'y a plus que ses rayons qui viennent  réchauffer un homme.

 

Elle n'est jamais en repos que ce soit dans sa tête ou avec le corps, cherchant dans des mouvements perpétuels l'équilibre entre sa raison et ses envies.

Elle sourit d'un sourire de gamine et subitement s'affaisse tournée vers ses images intérieures. La fêlure est là, sournoise  car trop récente, usante à venir et revenir, décapant son existence qu'elle maintient à bout de bras.

Imaginez ! En peu de temps, presque dans le même mois, et son père et sa mère et son frère ont pris séparément le chemin de la rue du cimetière la laissant désarçonnée après ces uppercuts qu'elle reçut dans la gueule à coups redoublés.

Et je la vois sourire, je l'entends même rire dans cette pièce blanche mais si son sourire l'illumine, si son rire cascade, ses yeux, ses yeux brûlants de pourquoi et de comment sont comme des balises dans un océan perdu.

Et des larmes alors restent suspendues quand un de ses gosses se pointe et vient chercher un baiser dans les bras de cette femme déboussolée.

 

En fait son intelligence la sauve et sa féminité la protège.

Intelligence d'avoir su comprendre que la vie est dérisoire dans ses atermoiements, alternant le futile et le cocasse au drame et à la séparation. Elle  a senti que ce rouleau compresseur dans lequel elle évoluait depuis sa naissance la broierait toute entière si elle ne recueillait pas avant tout l'éphémère "subtilité des choses", y compris dans le drame qui la traverse toute entière.

Sa féminité est une armure l'obligeant dans la glace à recomposer la femme qui est en elle et qui la bouscule, offrant ainsi au monde "extérieur" l'image qu'on attend d'elle.

Mais grand Dieu, que de force, que de détermination dans ce petit bout de vie mais aussi que de courage à vouloir s'éloigner des rives où l'attirent ses démons qui la démangent.

 

J'ai fait une pause un jour dans une petite ville du sud.

J'ai fait une pause avant de repartir suivre le chemin de ma vie et le vieil éléphant misanthrope que je suis a une nouvelle fois souri devant cette évidente force des femmes qui ne s'affaiblit que lorsqu'elles se savent seules.

Même et surtout quand elles sont très "entourées", la solitude n'est-ce pas est tellement plus redoutable quand on est coupé en deux.



12/04/2016
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